L'instrumentalisation de la compétence internationale de l'État membre de l'Union européenne : recherches sur la contribution étatique à la réalisation des objectifs communs

Thèse soutenue par Bastien ROSTAN le 21 novembre 2025 à Aix-Marseille Université.

Directrice de thèse : Valérie MICHEL, Professeure de droit public, Aix-Marseille Université.

Discipline : droit public.

 

Jury de thèse : 

Franck LATTY, Professeur de droit à l'Université Paris-Nanterre

Philippe MADALLON, Professeur de droit à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Francesco MARTUCCI, Professeur de droit à l'Université Paris Panthéon-Assas

Eleftheria NEFRAMI, Professeure de droit à l'Université du Luxembourg

Résumé de la thèse

La poursuite des objectifs de l'Union européenne au moyen de conventions conclues entre ses États membres est un phénomène observable depuis les débuts de sa création. Parmi les illustrations les plus emblématiques de cette pratique, l'on peut citer les accords de Schengen, destinés à supprimer les contrôles aux frontières communes, le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, relatif au renforcement de la discipline budgétaire, ou encore la très décriée Déclaration UE-Turquie, instaurée pour freiner les flux migratoires vers l'Union européenne. La compétence internationale de l'État membre est également instrumentalisée par le recours à la technique de l'acte unilatéral étatique, principalement utilisée pour défendre les intérêts de l'Union européenne au sein d'instances internationales qui lui sont fermées. L'adoption de ces mesures de droit international public interroge, car la logique d'intégration sur laquelle l'Union européenne est fondée suppose, théoriquement, que ses missions soient accomplies à travers l'action de ses institutions. Ce phénomène illustre alors le pragmatisme des États membres sur le plan fonctionnel, qui, souvent avec le soutien des institutions, n'hésitent pas à s'affranchir de la méthode intégrative lorsqu'elle ne permet pas d'atteindre efficacement les objectifs communs. La présente thèse cherche à démontrer que cette pratique peut être appréhendée et systématisée sous l'angle du principe de coopération loyale. Il est en effet proposé que ce dernier oblige les États membres à mobiliser leur compétence internationale dès lors que survient la nécessité, issue de l'inefficacité des moyens d'action prévus par les traités fondateurs, d'assister l'Union européenne dans la réalisation de ses objectifs. Un cadre juridique précis en découle, qui détermine les modalités d'exécution de cette obligation par les États membres, ainsi que la durée de leur intervention.


The achievement of the European Union's objectives through conventions concluded between its member states has been an observable phenomenon since its inception. In this regard, notable examples are the Schengen agreements, intended to abolish controls at common borders, the Treaty on Stability, Coordination and Governance, aimed at reinforcing budgetary discipline, or the highly contested EU-Turkey Statement, introduced to stem migratory flows toward the European Union. The international competence of the Member State is also instrumentalised through recourse to the technique of unilateral acts of States, primarily employed to defend the interests of the European Union within international bodies that exclude it. The logic of integration on which the European Union is based theoretically assumes that its missions are carried out through the action of its institutions. Consequently, the adoption of these public international law instruments raises questions. It highlights the pragmatic approach of the Member States, which do not hesitate, often with the support of the institutions, to abandon the integrative method when it is not effective in achieving common objectives. This thesis aims to demonstrate that this practice can be apprehended and systematized from the perspective of the principle of sincere cooperation. It is proposed that the latter should oblige the Member States to mobilise their international competence whenever there is a need, arising from the ineffectiveness of the means of action provided for by the founding treaties, to assist the European Union in achieving its objectives. A specific legal framework emerges, outlining both the implementation modalities of this obligation by Member States and the duration of their involvement.